« Il n’a même pas eu le droit de venir chercher ses affaires » : l’histoire d’un guinéen expulsé de France
Un commis de cuisine de 23 ans a été expulsé, ce 23 décembre. Le patron pour lequel il travaillait depuis trois ans dans un restaurant de La Rochelle est sous le choc et souhaite tout mettre en œuvre pour le faire revenir.
C’est un jeune homme enjoué qui, du jour au lendemain, a perdu toute joie de vivre. Employé du restaurant Ginger à La Rochelle, Ousmane Touré a été expulsé, ce samedi 23 décembre, vers son pays d’origine, la Guinée.
Lorsque nous parvenons à le joindre, le jour de Noël, Ousmane Touré est chez un ami à Conakry, en Guinée. « Ici, je suis dans le noir », lâche-t-il. « Je suis rentré en Guinée avec rien. Je ne sais pas quoi faire », reconnait-il, désemparé.
Son expulsion, samedi 23 décembre, est intervenue alors qu’il ne s’y « attendait pas ».
Depuis plusieurs semaines, le jeune homme avait lancé de nouvelles démarches pour obtenir le droit de séjourner en France. Les autorités françaises lui demandaient de pointer trois fois par semaine au commissariat. Vendredi 22 décembre, alors qu’il vient émarger à 9h, juste avant d’aller travailler, « un policier est venu me dire : ‘il faut vous mettre en centre de rétention’ et, il m’a enlevé mon téléphone ».
Après une nuit en centre de rétention, il a à peine le temps « de faire une petite toilette » que « trois policiers viennent l] chercher pour ]’emmener à Bordeaux ». Un policier l’interroge : « ‘Vous savez pourquoi vous êtes là ?’, m’a-t-il dit. J’ai dit que non. Il m’a dit que j’étais là pour retourner en Guinée. »
Ousmane Touré prend la situation avec fatalisme et décrit la décision de l’administration française de le renvoyer comme « une volonté de Dieu ». Puis il ajoute : « Je n’ai pas souhaité ça pour moi. Ce n’est pas mon vœu. »
Son espoir, que la solidarité autour de son cas lui permette de revenir à La Rochelle où il a laissé son travail dans un restaurant et ses amis.
Son employeur, Carlos Foito, patron du Ginger à La Rochelle n’a pas de mots assez doux pour parler de son employé de cuisine. « Rigoureux« , « irréprochable« , « adoré partout où il passait« , décrit-il dans une publication sur le réseau social Facebook.
Parti à l’âge de 15 ans
Le parcours d’Ousmane Touré est difficile. « Il raconte qu’il est parti de chez lui quand il avait 15 ans quand ses parents sont morts d’une épidémie, peut-être Ebola, explique Didier Meyerfeld, le bénévole de l’association Solidarité Migrants qui s’occupe de son dossier. Puis, il est parti dans un long périple : pendant trois ans, il est allé au Mali, en Algérie et au Maroc. Toujours en travaillant pour payer le voyage. »
Lorsqu’il arrive en France, le jeune homme désormais majeur fait une demande d’asile au début de l’année 2019, mais il est définitivement débouté fin 2020. Entre-temps, il se fait employer à La Rochelle. « Il a travaillé dans un autre restaurant, puis on me l’a recommandé, se rappelle Carlos Foito, son patron. Malheureusement, c’était le début du confinement, et je n’ai pas pu le prendre tout de suite. »